Facebook: le fabuleux merdier, ou le reflet de dérives inquiétantes

Je vais essayer de ne pas (trop) cracher dans la soupe Facebook, j’y suis.

Il y a cependant un certain nombre de constats qui me font réfléchir. Ca tient à des questions très simples: pourquoi on y vient? Qui y vient? Qui en sont les spectateurs? Et vers quelles dérives ce type de "social networking" nous entraîne-t-il?

On y vient de toute évidence pour parler de soi, être en contact avec des amis, de la famille. Poster quelques photos de soi et partager centres d’intérêt et passions. Ca, c’est disons la version saine et officielle des choses.

Facebook, c’est un peu la fin de l’ère où l’internaute moyen masquait son identité, et par la même sa vraie vie, professionnelle, personnelle, par un pseudonyme. Là, on y donne, on DOIT (c’est dans les conditions d’utilisation) y donner ses vrais noms et prénoms, et lorsqu’on se crée un profil, tout y passe, depuis le numéro de téléphone personnel jusqu’au lieu de travail en passant par les opinions politiques et religieuses. Certes, à part le nom, le prénom et une partie de la date de naissance, tout cela est optionnel, mais moi qui vois le mal partout, j’avoue éprouver quelque difficulté à trouver cela parfaitement banal et innocent. Pas banal, mais certainement banalisé. On remplit les cases de sa vie personnelle comme on remplit sa feuille de sécu.

Cependant, on n’y vient pas pour décliner une sorte de fiche sur ce qu’on est, on y vient pour "se changer les idées", parler avec d’autres, et la dimension ludique est indéniable. Sur mon propre compte, une vingtaine d’applications par jour pour des quizz plus ou moins imbéciles, et des "applications" sous forme de jeux. Homo informaticus sapiens devient facilement Homo ludus crétinus, hein. Ca ne demande pas beaucoup de neurones, la curiosité basique fait le reste. C’est exactement comme ceux qui lisent leur horoscope dans Télésprout ou qui font le test pour savoir s’ils sont bons au plumard dans un quelconque magazine "réservé à un sexe".

Première  chose, tout le monde peut voir les résultats des tests.

Seconde chose, les jeux à succès sont généralement américains et assortis d’un système payant, de Mafia Wars à "adopte un bébé poulpe et fais-le grandir". Là s’arrête la merveilleuse sensation de gratuité et de liberté.

C’est ahurissant de constater que des jeux consistant à accepter simplement des points et à en donner à ses contacts ont autant de succès (les machins "is cool", par exemple). C’est encore plus troublant de penser que lesdits contacts sont la plupart du temps de parfaits inconnus avec qui on n’aura jamais le moindre échange, et qu’on va jusqu’à élaborer des stratégies et même des tricheries pour être celui qui a le plus de points. Passe encore quand on a 10 ans, mais dans l’exemple décrit il s’agit d’adultes, qui n’ont visiblement pas passé le stade de mesurer leur zézette ou de comparer le prix de leur bagnole avec celui de la bagnole du voisin.

Les contacts, parlons-en. Facebook est en façade formidable, tout le monde peut être pote avec tout le monde. Je peux si je veux accepter l’invitation d’un étudiant bolivien aux beaux-arts ou d’un maçon de l’Arkansas.

Seulement, ça implique une stricte application à l’américaine du politiquement correct, puisque tout le monde est beau et gentil, et qu’il ne faut surtout pas risquer un procès parce qu’on dira ou qu’on montrera quelque chose susceptible de choquer une autre culture. On peut avoir des "amis", à la condition expresse d’être lisse, docile à cette morale, et à ne dire du mal de personne.

Certes, il y a de francs délires bien farfelus et irrévérencieux, via des groupes rassemblant une poignée d’internautes ayant décidé de rigoler un peu ce jour-là, mais ça ne va pas plus loin.

Les photos, et je m’en rends compte entre autres via ce que certaines amies me racontent, c’est un problème majeur. On est dans une société de l’image et du visuel, du paraître, et presque tout le monde a un numérique ou une webcam pour poster bien gentiment sa margoulette (ou son fion, bien que ce soit officiellement interdit, d’aucuns ne se privent pas de le faire).

Or, l’expérience me prouve qu’énormément de photos sont volées sans consentement aucun, stockées sur des disques durs de particuliers à travers le monde, qui vont les réutiliser sans respect aucun pour la personne qui y est représentée pour créer de faux profils.

Des faux profils par millions, c’est ça Facebook. Pour la drague, pour les mythomanes en mal de sensations, mais aussi parce que beaucoup de "gros" jeux poussent à avoir un maximum d’amis à inviter, alors quand on en n’a pas assez…on en invente! Ca porte même un nom dans le milieu des joueurs des jeux présents sur Facebook, ça s’appelle des "clones" ou des "ghosts". J’en ai moi-même créé quelques-uns pour rigoler, non que je sois schizophrène, mais ça doit être mon vieux fond de culture rôliste qui ressort. Des faux grossiers, avec par exemple des photos de stars internationales et des hordes d’imbéciles en pâmoison comme s’ils n’avaient jamais vus ces visages, et comme si la photo de Britney Spears sous le nom de Jeanne Pédoncule n’émeuvait personne. Quels sont les plus cons, ceux qui créent ces faux ou ceux qui en sont dupes? Je me tâte. On en oublierait presque qu’il y a de vraies personnes à qui on pique de vraies photos et que c’est un tout petit peu légitime que lesdites personnes se sentent flouées quand elles s’en rendent compte, pour pas dire que ça s’apparente métaphoriquement à un gros coup de bite non consenti. Les clones font rire pas mal de monde, sauf ceux qui ont donné la matière première du clone, ne l’oublions pas.

Et puis, à l’heure où des sociétés privées veulent notre fric en nous ciblant en tant que clients, quoi qu’en disent les créateurs de fesse de bouc, j’ai trop peu de naïveté intrinsèque pour penser que ce n’est pas un merveilleux outil de fichage pour des multinationales, un portail publicitaire gigantesque pour les opportunistes, voire un tremplin à spyware et à spam pour les plus pourris de la bande.

C’est extrêmement intéressant pour beaucoup d’entités publiques ou privées de savoir qui on est, avec qui on est potes, ce qu’on pense, notre âge, notre taille de jeans, notre parcours pro, si on pue des pieds ou pas, si on a voté Sarko ou si on soutient les autonomistes du Boukistan.

L’administration Obama a déjà pour projet de créer un gigantesque fichier de données personnelles pour les citoyens américains.

Puisque les étatzuniens sont les maîtres du monde et de la morale ultime (bon, et aussi du système pognonophile) il est plus qu’évident que les petits copains vont regarder par-dessus leur épaule pour copier la rédac’ du petit père Barack.

Moralités:

-Est-ce que ça crée réellement du "réseau social" et de nouvelles amitiés? Oui, mais dans de très nombreux cas, on se contente d’arborer une belle liste d’illustres inconnus.

-De quels malades c’est le terrain de jeu? Oh, de plein de monde, il ne faut pas être grand devin pour l’inférer. Pervers de tout poils, pédophiles, mouvements sectaires, terroristes, extrémistes. Et techniquement c’est juste impossible de les filtrer tous et de les empêcher d’utiliser cet outil fabuleux pour eux.

-Est-ce que ça peut aider l’individu? Oui, dans certains cas à trouver un boulot, pourquoi pas. Ou, dans mon cas personnel, je n’aurais jamais eu autant d’opportunités d’échanges de connaissances et d’animaux dans le monde de la terrariophilie que via Facebook, ça surclasse largement les possibilités offertes par les forums. Et au moins,  on sait qui est réellement maître de son sujet et qui n’est qu’un péteux de débutant, là contrairement aux fora il n’est plus question de la ramener sur de pseudo-connaissances qu’on n’a pas. Ca peut aussi permettre à des gens qui ne se seraient autrement pas connus de découvrir qu’ils ont les mêmes idées ou les mêmes centres d’intérêts dans des domaines très vastes ou au contraire extrêmement pointus.

-A qui le crime profite?

=> Aux sociétés commerciales privées, Internet devenant de plus en plus un outil pour le grand lavage de cerveau collectif appelé marketing, Facebook leur donne des informations qui autrement se négocient à prix d’or sur des "cibles", c’est à dire, nos gueules. J’ai horreur qu’on prenne ma gueule ou quelque autre partie que ce soit de moi-même pour une cible, et je n’ai nulle envie de découvrir un jour qu’un type qui me réveille chez moi sur mon téléphone perso pour me demander si je ne veux pas acheter une télé qui fait aspirateur et cafetière en même temps ait pu un seul instant remonter jusqu’à moi via Fesse de Plouc.

=> Aux organismes de nos états dits "démocratiques" qui n’ont de cesse eux aussi de cibler l’électorat, de prétexter de lutter contre tel ou tel fléau criminel pour tous nous ficher comme des moutons. Police, services de renseignements, appareils politiques, les clients ne manquent pas.

=> Aux mouvements sectaires qui veulent repérer des paumés qui leur donneront bien gentiment leur fric; plus on en sait sur une victime potentielle, plus le travail est mâché.

Toute innovation comme celle-ci apporte un bien, il ne faut cependant pas être aveugle sur le côté obscur du phénomène de société. Alors, avant de se faire emmancher par un cyber-Dark Vador qui veut notre fric, connaitre notre vie pour mieux nous contrôler dans un pays, une entreprise et j’en passe, il faut avoir la force mentale de savoir ce qu’on fait sur facebook, quelles conséquences ça peut avoir, et de s’exercer le rectum à plus de tonicité au cas où il faille le fermer brutalement.

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17 commentaires pour Facebook: le fabuleux merdier, ou le reflet de dérives inquiétantes

  1. sandrine dit :

    Et bien ,Hervé, si cela est ton patronime, cela fait plaisir de lire ce genre d\’analyse…Fb est un outil ludique fort sympathique, mais un superbe piège à innocents et autres débiles de tout genre sans parler des jeunes toutes cathégories confondues!J\’ai pu lire des n° de téléphone en ligne…Faut il ètre stupide…J\’adore m\’y promener, parfois je croise de purs idiots et parfois des gens qui sont effectivement devenus des amis avec qui je partage le casse croûte régulièrement…Ils sont rares!!Etant une parano affirmée!!Mais, la décompression cérébrale que j\’ trouve me sied…Osons retourner à l\’adolescence de temps en temps!!!Par contre, une chose me sidérant, c\’est , au niveau philosophique du terme,le superbe outil qu\’est Fb pour étudier le comportement de l\’homocrétinus de base et ses dérives….Qie cela soit ici ou bien ailleur sur cette "minuscule" planète, les gens binque ne parlant pas la même langue, se comportent tous de la même manière……….Désespérant!!!!!!!Voilà en quoi Fb m\’interresse……..La psychologie………Et bien ce n\’est pas beau!!!

  2. sandrine dit :

    désolée pour les fautes de frappes, j\’aurais du me relire!

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